27.8.25 En complément du billet précédent sur le SNA, j'ai retrouvé un texte que j'avais publié en 1996 dans mon deuxième livre "Cuisine nature... saine et sereine", où je traitais déjà de ces déphasages profonds du corps.
Voici le texte publié à l'époque, qui fait pendant à ou doublon de Introduction au système nerveux autonome SNA et à ses déséquilibres
L’homme de nos jours possède les mêmes organes et les mêmes glandes que l’être humain d’il y a des centaines et des milliers d’années. A cette époque, les chocs auxquels ces glandes étaient supposées répondre par production d’hormones et de neuromédiateurs étaient la protection du territoire, le manque de nourriture, la menace des bêtes sauvages, le manque de feu, etc.
Aujourd’hui la nature et la quantité des stress a bien changé : c’est tous les jours, à chaque instant que nous sommes confrontés à un tigre ... de papier. Des micro-stress, peu décelables à l’œil, sont reçus comme tels par l’organisme et s’accumulent… On se bétonne … mais on en arrive parfois à un trop-plein de microtraumas physiques et psychiques.
J’utilise ici le terme courant de « stress », mais il est plus juste de parler d’agents stressants, vu que la réactivité dépend de chacun. « Stress » n’a pas de définition précise.
Un agent stressant n’est qu’un élément déclenchant : c’est votre réponse personnelle à cette agression qui compose le stress. Un agent pourra stresser l’un et pas l’autre, pourra dériver en stress chronique chez l’un et pas chez l’autre. Une réaction déséquilibrée à un stress chronique peut résulter, comme l’a démontré Henri Laborit, en une inhibition de l’action : impossibilité ou difficulté à faire face à d’autres agents stressants. Le sujet s’écroule au lieu de fuir ou combattre (« fight or flight » en anglais, soit lutter ou fuir).
NB. Je reprendrai dans des billets séparés l’approche de Laborit, si brillamment représentée dans le film d’Alain Resnais « Mon oncle d’Amérique ».
Un agent stressant peut aussi bien être un méchant patron qui vous fait crouler sous la tâche que des micro-stress répétés : trop de bruit, des polluants en pagaille dans un corps mal équipé pour y faire face, la pollution électro-magnétique et ... trop d’additifs ou de produits allergisants tous les jours, entre autres. Toute agression sur le système est un agent stressant.
L’être humain encaisse comme il peut, le corps fait ce qu’il peut pour se protéger, mais malheureusement il ne peut encaisser indéfiniment : un maillon dans la chaîne glandulaire ou nerveuse peut céder. On ne sait pas quel maillon va céder, ni quand, puisque tout dépend évidemment de la force vitale de ce maillon : surrénale, hypophyse, foie, thyroïde, etc.
Le discours le plus courant, surtout aux States, est que la répétition des agents stressants peut entraîner des décharges exagérées d’adrénaline et de cortisol, générant une augmentation des anomalies du comportement : réactions explosives et inadaptées, fuites, crises convulsives ou attitude figées, de la nervosité, de l’irritabilité, un sentiment de fragilité assez insécurisant ; et des effets physiques majeurs : palpitations cardiaques, une fatigue plus ou moins permanente, des insomnies, des troubles orthostatiques (POTS en anglais), de l’anxiété ou des crises de panique, une soif excessive, des vertiges, de la constipation, des diarrhées, de la tachycardie, des cycles féminins irréguliers, des fibromes, des gastrites, etc. La liste non exhaustive est infiniment plus vaste..
A longue échéance, il se crée un circuit pathologique où l’inflammation générée par ce déséquilibre perturbe encore plus le système autonome, comme si un « mouvement physiologique perpétuel » s’installait, qui se reproduira tant que le déséquilibre autonome à la base n’est pas corrigé.
Il semble clair que, pour revenir à un de mes sujets chouchous (la diète cétogène n’est pas une panacée »), ’il ne suffira pas de retirer le sucre de l’alimentation pour « guérir » un hypoglycémique, par exemple.
Que se passe-t-il au plan physiologique ? J’expose dans un autre billet les mécanismes du système nerveux autonome (SNA) et les déséquilibres qui peuvent impacter tout l’organisme – ce qu’on appelle en français « dystonie neurovégétative » et en anglais « dysautonomie ». Je garderai le dernier terme. Voir https://taty.be/burnout/SNA_2intro.html
Cette approche de dysautonomie appliquée à la fatigue chronique, aux maladies inflammatoires et auto-immunes était expliquée de manière très claire sur le site du Dr. Poesnecker (en anglais) : « www.chronicfatigue.org ». Ce dernier (hélas décédé il y a 25 ans) a traité quantité de patients pendant plus de trente ans pour ce qu’il a appelé « hyposurrénalisme » et qui est nommé aujourd’hui « fatigue chronique », parfois « surrénalienne ». Vers 1996, date de mes premières recherches, j’ai énormément appris chez lui. Son travail est repris par le docteur Andrew Neville, naturopathe de formation : https://drandrewneville.com/category/all-articles/ ou https://www.youtube.com/@DrAndrewNeville.
C’est chez Poesnecker que j’ai découvert le syndrome de maladaptation au stress de Selye (voir https://taty.be/burnout/SNA_2intro.html#Selye) et son impact sur nos multiples bobos quotidiens.
Il est important de se rendre compte que ce déphasage autonome ou glandulaire peut constituer à la longue un danger pour le système immunitaire entre autres. « Je passe au travers de tout », dites-vous ? Peut-être est-ce le cas, peut-être êtes-vous dans l’état où je me suis trouvée pendant des années de ma première vie active surmenée, le ressenti « bétonné » par une vie de petite rate de laboratoire, tournant à vide dans sa cage. Imaginez que vous êtes dans le même état que ces étudiants en médecine qui se disaient blasés pourtant et à qui on a présenté des films montrant des scènes de cruauté et de meurtre : leur adrénaline urinaire augmentait de 70% et la norédraline de 35%, sans qu’ils ne ressentent rien. Le corps, lui, engrammait bien une forme d’agression. Je trouve prodigieux que le corps humain arrive à s’adapter à de telles conditions.
Même si l’esprit semble blasé, le corps ne l’est pas. « Le corps n’oublie rien » démontre le psychologue Bessel van der Kok dans ses ouvrages. . Les hormones et neuromédiateurs produits ou inhibés par le SNA en souffrance sont des éléments très subtils dans l’équilibre global de l’organisme et leur production en excès peut être comme un cheveu dans la soupe: un jour, ça passe ; tous les jours, ça casse.
La production dérégulée d’une hormone ou de neurotransmetteurs se fait parfois au détriment d’autres circuits et ont des répercussions inattendues pour qui ne les connaît pas. Les défectuosités surrénales peuvent entre autres effets délétères déplacer la production hormonale ordinaire – des insulinorésistants repentis n’oseront pas vous dire qu’ils connaissent à nouveau des désirs sexuels inavouables ... parce qu’oubliés depuis si longtemps. Ces mêmes surrénales, par exemple, peuvent augmenter leur débit par sursollicitation et finir par produire trop de cortisol : l’accumulation de celui-ci provoque une diminution des défenses immunitaires, une plus grande sensibilité aux maladies allergiques, des troubles cutanés et même des dépressions nerveuses. L’exposition continue aux corticoïdes produits naturellement affaiblit les os et accroit le risque de fracture, tout comme le fait la cortisone en pilule. Cet excès de cortisol peut aussi favoriser les poussées d’ulcères, des arthrites rhumatismales... D’autres sujets, eux, connaissent le phénomène inverse : ils n’arrivent plus à produire assez de cortisol.
Pourquoi m’intéresser à la dysautonomie si je ne suis pas franchement épuisé ?
La majorité des plaintes entendues chez les praticiens aujourd’hui concerne soit la digestion soit la fatigue. Il ne faut pas ttendre d’avoir passé la limite pour agir, d’avoir attendu d’être en épuisement chronique franc ou en maladie chronique. On peut vouloir vivre mieux vieux ou épargner à nos concitoyens ou à nos enfants une lourde charge de sécurité sociale. Nos grands-parents répétaient : « La goutte qui tombe régulièrement sur la pierre finit par la creuser… Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse… Passé soixante ans, on paye ses dettes », . Les erreurs d’hygiène de vie ne tuent pas, mais elles accélèrent le processus de sclérose.
Il est sidérant d’observer que des sociétés entières foncent dans un mur thérapeutique sans vouloir voir qu’il est peut-être possible techniquement d’éviter quantité des petits malheurs quotidiens. Les médecins les plus respectueux de Dame Science reconnaissent qu’aujourd’hui rien d’efficace n’a encore été trouvé pour lutter contre de simples rhumes, d’atroces migraines, pour atténuer les syndromes prémenstruels ou les vertiges – tous les petits bobos dont on peut être soulagé après une réforme d’hygiène de vie globale.
La fatigue chronique, l’un des troubles les plus nettement améliorés par ce système, est maintenant en voie de reconnaissance par nos instances officielles : on va donc pouvoir rembourser les médicaments et la mutuelle va prendre en charge les congés de maladie ... Super! C'est si sûr? Ce ne l'est pas à mes yeux, car aucun médeicament efficace n'a encore été trouvé, les techniques proposées ont des résultats aléatoires. Alors qu’il suffirait peut-être d’envisager la piste d'une dysautonomie et des techniques utiles pour rétablir l'équilibre.