Tous les mangeurs n'ont pas les mêmes réactions que celles que je vais décrire. Pour ceux qui les vivraient, je pense utile d'expliciter ce que je vis ici, car je ne l'ai lu déployé dans aucun manuel de nutrition ni même par aucun autre auteur. Ce sont des évidences d'écoute de soi qu'il ne fallait peut être pas exposer clairement auparavant, quand nous n'étions pas si déconnectés par une vie quasi virtuelle.
La prise de corticoïdes (sujet du billet nr 11) agit à un niveau élevé en puissance dans l'organisme, puisqu'ils viennent changer la donne au plan endocrin, comme le feraient des oestrogènes ou de la progestérone. Exactement comme peut le faire une cure bien choisie et bien menée, ciblée au bon moment, pour certains mangeurs. Je pense à la cure Retour à soi (à paraître), qui en 8 semaines arrive à reprogrammer l'hypothalamus, si l'on veut. Je pense à la Cure antifatigue qui, en deux semaines, chez certains (eh non pas chez tous), reprogramme les circuits de telle sorte qu'au sortir de la cure le sujet sent vivre comme dans une autre biochimie.
Je suis attentive aux changements subtils dans l'organisme car je suis "topo-sensible" - terme que j'ai créé, n'en connaissant pas d'autre dans la doc classique. Cela mérite un nom, car, au cours de mes séminaires et conférences, j'ai rencontré plus d'un autre hypersensible similaire. On se tombait dans les bras: ah je ne suis pas seule! Je n'ai pas le syndrome des multiples personnalités (sinon je serais en asile, les amis, non?), mais j'ai comme plusieurs biochimies à disposition: selon le lieu où je me trouve, j'ai des réactions différentes. Mon odeur corporelle change, mon mental, mes rythmes quotidiens naturels aussi (réveil, faim, etc.). L'instinct alimentaire se modifie aussi, tout comme les aliments qui me rassasient et me tiennent verticale et active.
Exemples. A Paris intramuros, par exemple, il est hors de question de me présenter un steak, que je regarde comme si c'était un paquet de cartes: "ça se mange?". Je peux survivre de pain et de beurre, de légumes et de fromage blanc. Sans aucun souci digestif, même en consommant du pain, délicieux, bien choisi, mais non bio. Sans tomber de sommeil, ce qui est parfois l'effet du pain sur ma biochimie "de Nivelles". Dans ce territoire, j'ai une énergie renouvelée dès que je m'y installe (mon camping car au camping du bois de Boulogne). Je souris et je trouve tout charmant, je vois disparus mon cynisme et ma langue de vipère habituels. Je n'ai envie que de courir et flâner. Impossible d'écrire ou même de donner mon avis sur les réseaux sociaux, ça me semble "du travail".
Tandis que dans ma petite ville de province belge, je suis toute différente, comme gelée dans mes énergies et ma "jouissance en branche parasympathique" (pas d'explication, c'est pour les initiés) - Déménage, dit la copine - Et mon mec et ma famille? réponds-je. Je ne tiens le coup qu'en mangeant une diète assez particulière: LCHF tendance très omnivore. Il y a plein d'aliments que mon corps ne supporte pas.
Je dois avoir un désordre de la dopamine ici, car j'ai un enthousiasme hors pair pour produire & faire: écrire des articles, des livres, des résumés, tisser, coudre, filer. Flâner: hein quoi? ça veut dire quoi? Profane en la matière, je soupçonne la dopamine suite à quelques lectures et quizz-tests, autant que sur base d'une exemple proche: ma fille naturopathe a voulu tester un échantillon donné par un délégué de labo, l'année passée. En deux jours de supplémentation de dopamine: "maman, je suis devenue toi, je ne peux m'empêcher de faire la leçon à tout le monde sur le net, je ne peux pas laisser passer un commentaire sans donner mon avis, j'ai envie de changer le monde". Arrêt de la supplémentation, arrêt des effets. On en a bien ri.
Je pense même avoir un câblage électrique différent dans cette ville-ci en particulier. Nous sommes des êtres électriques, finalement, non, la cellule étant une petite batterie avec ses échanges H- et autres? Dès que je voyage plus d'une semaine hors de cette maison/cette ville (qui saura si c'est le lieu particulier ou général?), dès que je reviens m'y installer, je vis un état de désordre intérieur, de vide pendant une journée entière - que j'ai conduit ou pas, longtemps ou pas. Etat que je ne peux que décrire à mon compagnon comme "recâblage électrique". Je sens vraiment qu'au plan cellulaire quelque chose change dans tout l'organisme. Tout vibre différemment, et j'ai besoin d'une journée couchée pour m'y adapter.
Ah je rêve du moment où la biologie prendra en compte toutes ces forces en présence, au lieu de n'envisager que ce qu'on peut chiffrer, comme si on était des comptables de la vie; et au lieu de prendre tous les humains pour des entités identiques comme si l'on était du bétail cloné.
Merci à cette toposensibilité, qui a fait que j'ai pu vivre dans diverses formes d'instinct alimentaire, ce qui me permet d'accueillir toutes les formes d'observation par les autres mangeurs. En nutri, il ne vous aura pas échappé qu'un prof ou un maître à manger conseille en général un seul plan, qui est souvent le sien: un profil omnivore ascendant chasseur (facette en profilage à ma façon) conseillera quasi toujours le plan paléo ou Weston Price? S'il s'est meurtri par un passage par le végétarisme, il oubliera quasi systématiquement de suggérer à la kyrielle de mangeurs qui en profiteraient à plein une diète ambiance "living food" que j'ai résumée en "cure antifatigue".
Le sujet fait l'objet d'un billet entier, que j'ai transposé ici: "Le "docteur Curtay": la mort est dans le steak... !!??"
Après cette petit intro acide sur le sujet du profilage, le carnet de mamzelle fricadelle en corticoïdes: je n'ai plus envie de viande ou assimilé, ma main se dirige vers des oeufs dur mayonnaise, des pommes tranchées, des légumes braisés (vapeur: n'a jamais été mon truc), des pâtes au beurre fondu et herbes... En supplément des mes rituelles oranges, hors saison je sais mais c'est le caprice de mon corps et voilà. J'ai encore du pâté de foie, fabrication maison de l'excellent boucher Dierendonck. J'ai encore des os à moelle au congélo. Le foie et la moelle me font d'habitude des appels du pied (du sabot?) tels que je ne les partagerais avec personne, mes enfants compris. Ici, je termine le pâté "pour ne pas gâcher", mais "ça ne me goûte pas", comme on dit à Bruxelles. Je ne pense même plus aux os à moelle. Et je me sens droite et verticale, sans appel particulier de nourriture particulière.
Je suis à la mer, sur le petit bateau, seule: c'est plus facile de s'écouter, de suivre ses horaires naturels, d'improviser. Personne pour crier dans les escaliers: "quand est-ce qu'on mange? qu'est-ce qu'on mange?". Juste ma petite voix intérieure qui soufflera les mêmes questions...
Vu l'effet radical du corticoïde sur la "paralysie" musculaire et les douleurs capsulaires, j'ai changé d'avis: je ne vais pas arrêter le 3/9.
Je vais combiner un mix de quart de dose et de techniques autres (combinaison d'huiles essentielles, de gemmothérapie et de paracétamol). En espérant que je ne vais pas développer une forme de mithridatisation en pratiquant ainsi.
Je ne suis pas étonnée que peu de personnes pensent à ce mix, car j'ai toujours eu l'impression d'être face à des "écoles" en "camps": soit allopathie soit médecine douce. J'ai toujours pratiqué un mélange, qui me va bien. Rien ne vaut l'amoxycilline dans certains cas chez moi, rien ne vaut le melaleuca alternifolia ou le charbon de bois dans d'autres. J'ai parfois des doutes quand des copines me disent prendre de l'homéopathie pendant la cure d'antibiotiques ou d'huiles essentielles, mais ce n'est qu'un doute: comment des produits travaillant sur des sphères si différentes peuvent-ils être combinés? Les soignants sauront mieux que moi. Dans mon cas présent, je fonctionne mieux avec du pondéral qu'avec l'homéopathie ou les fleurs de Bach.
J'ai finalement choisi (différent du projet dans le billet 11) de prendre une demi-dose de corticoïde tous les deux jours, ce qui me fait le quart de la dose: en moyenne j'aurai eu 4mg par jour. Ainsi, je pense que le corps continuera à produire - ou essayer de produire - un peu d'hormones de son côté. Le défaut, m'a-t-on dit, de "la cortisone" étant que le corps ne produit plus de cortisol, à force d'être gavé par l'extérieur. Ce qui explique pourquoi en médecine classique on doit très très lentement sevrer le sujet qui a reçu une toute première dose très élevée. Le sevrage sera donc plus rapide, puisque je pars d'un seuil bien plus bas.
Je comprends le principe de la dose très élevée de départ, comme 0.2mg par jour/kilo pour certains et le double pour d'autres: il faut calmer l'inflammation et les douleurs vite fait. Réflexe naturel du médecin, qui a choisi un métier de sauveur- quitte à devoir prendre un an pour sevrer. Je n'ai pas choisi ce métier, je n'ai rien d'un sauveur: je suis plutôt un dealeur avec mon corps: on discute, on négocie...
Le jour alterné où je ne prends pas le médoc, je peux supporter un peu de gêne dans les mouvements et de la douleur. Ce jour-là, j’utilise les bourgeons de cassis qui sont une forme de cortisol-like (15 gouttes deux fois par jour, un peu beaucoup mais quand on aime on ne compte pas) - ou tout autre que la médecin conseillera. Pour prévenir les douleurs, je prendrai du paracétamol: 1/2 panadol 500mg le matin, idem le soir. Pour tenir l'inflammation sous le boisseau (je le sens quand "des muscles n'obéissent plus"): je m'oins les hanches et les épaules d'un mélange d'huiles essentielles à la Baudoux (gaulthierie, eucalyptus radiata, laurus nobilis).
Premier essai ce jeudi. J'ai pu observer depuis hier que la demi-dose fait effet environ 14h-16h. Ensuite reviennent la paralysie et la douleur, mais à un niveau largement inférieur à ce que c'était auparavant (20% d'avant, si "avant" les valeurs étaient 100%). Ce n'est qu'un jour, je vérifierai sur la durée.
Hier mercredi j'ai pris le corticoïde à 16h (deuxième demi-dose de mes essais). L'effet lénifiant a commencé à 20h, on se serait douté que l'effet n'est pas aussi rapide qu'après une injection. On comprend pourquoi il faut le prendre le matin: je me suis levée fraiche et dispose à 1h30, en pleine nuit. Je me suis forcée à redormir de 7h à 10h. Désormais: prise le matin. L'effet de la prise d'hier semble s'estomper vers midi. Je boitille, je n'ai plus la même amplitude des bras. Ce jeudi est un jour sans corticoïde, patience.
Ce jeudi, je conduis sur l'autoroute 1h30 (c'était le moment le plus douloureux avant), je sors de la voiture un peu boiteuse (niveau douleurs = 40% d'avant). En quelques minutes de marche, je suis presque fluide (retour aux 20% d'avant).
16h Je suis arrivée à destination, je peux m'asseoir sans l'aide des bras, me lever sans avoir mal. Cela vaut un 15-20% sur mon échelle de 100%. Tout comme l'épisode à 18h: promenade sur la plage avec le chien, 1 km aller-retour. Grande première! Je ne tenais que 100 mètres jusqu'avant-hier. Un peu boitillante, mais pas vraiment mal. Comme si j'avais des bleus aux hanches. Je m'assieds normalement dans la voiture, sans les contorsions habituelles. Je me repose couchée au retour, par précaution.
Je prévois de reprendre ce jeudi à 20h 1/2 paracétamol 500mg, 15 gouttes de gemmo cassis + HE sur hanches et épaules, pour la nuit. J'ai oublié paracétamol et HE, c'est pas sérieux.
Couchée à 21h, levée à 3h, sans aucun réveil la nuit pour cause de douleur. Ouf!
Je suis raide comme un piquet, douleurs dans les zones habituelles mais au moins les muscles obéissent: je me lève du lit en gigotant, mais ça ne prend plus les dix minutes d'avant.
A 3h du matin ce vendredi: je reprends 8mg de corticoïde, qui fera son effet dans quelques heures j'imagine. Pas de souci: j'écris le matin, je ne sens généralement rien soit couchée soit assise, si ce n'est une vague tension dans les biceps. C'est aux changements de position que oh! ma douleur! Je ne dois pas me dérouiller avant 8h, de toute façon, première promenade avec Rantaplan. Si l'effet dure bien de 14h à 16h, donc à partir de 8h - premiers effets lénifiants - , j'aurai toute la journée non raide, non douloureuse au moins jusqu'en soirée. Ce soir je n'oublierai pas le trio: para + HE + cassis, car demain samedi: jour sans corticoïde. Le jour corticoïde, ce médicament est si efficace que je n 'ai besoin de rien dans le trio que j'appelle "naturel".
NB. Anecdote à la maison. Mon mec, voyant le fabricant sur la boîte de Medrol: "on dit merci qui? merci Pfizer! tu vois hein quand même".
Moi, grand sourire: "Tu blagues? on dit merci Taty d'avoir suivi un raisonnement qui semble logique, merci P. de m'avoir mise sur la piste. Pfizer n'est que mon épicier. Tu remercies l'épicier quand tu dégustes un plat divin? "
Quel suspense! Ce programme va-t-il être efficace? Durable? Cela m'a toujours amusée de tester, d'évaluer, de contrôler, de rectifier. J'ai pris le tensiomètre et le testeur de glycémie, j'adore valider par des chiffres, même quand je m'en moque. Parlant de tension, je la prends à 5h du matin: 13/9, ma belle tension d'avant. Serait-ce que le corticoïde fasse de l'effet plus rapidement que je ne pensais?
A +-7h, en effet, soit 4 h après la prise de misteur corticoïde: bonjour souplesse!
Je suis trop heureuse, je file à la plage avec toutou. Je n'oserais pas encore courir, mais je vise d'augmenter la longueur de promenade. L'effet a perduré, j'ai pu retourner le soir faire une longue balade (longue par rapport aux cent mètres d'il y a une semaine)
J'ai oublié de noter que je prends quand même d'autres médicaments: depuis dix jours de l'astragale comme adaptogène et du chrysanthemum pour la pierre au rein gauche. Je ne sens aucun effet ni négatif - ouf! c'est rare - demandez à ma soeur naturo qui n'ose plus rien me conseiller vu mon historique ;) - ni positif. Cela doit travailler en fond, en sous-couche. Qui sait si l'effet si rapide du corticoïde à demi-dose ("trop" rapide?) n'est pas une synergie avec l'astragale? C'est mon intuition en tout cas. Autre médocs: un jour sur deux ou sur trois, quand mon instinct me le dicte, un peu d'acide ascorbique pur, le matin. Et toujours le bisglycinate de zinc (carence de naissance) et le GTA le midi (quand je suis à Nivelles).
Vivement que ça se normalise, j'ai l'impression d'être devenue une pharmacie. Dire que tant de mes connaissances trouvent normal de prendre des médocs en permanence. Souvenir du regard étonné d'une médecin consultée en urgence: "à 66 ans, vous ne prenez RIEN comme médicament quotidien?". J'en ai déduit que c'était rare...
Ce qui précède n'a lieu d'être que comme illustration qu'un péquin peut se prendre en charge, s'observer, se gérer avec l'aide d'un soignant et non sous sa coupe. Ici, je n'ai pas encore vu le médecin, mais j'ai envoyé mon carnet à des amis soignants, pour leur demander leur avis sur ma logique (raison d'être de celui-ci, d'ailleurs). Il fallait que j'agisse, cela durait depuis de trop longues semaines et je n'ai pris rv que pour le 8/9.
C'est en outre l'illustration du parcours d'un maverick, terme anglais qui n'a pas de traduction. Etymologie: un maverick est ce veau sans marque de propriétaire qu'on trouve dans les prairies chez les cowboys. Ce terme qualifie les anticonformistes sans attaches, les explorateurs pionniers solitaires. On ne peut donc généraliser ma posture qu'aux autres mavericks. Et encore! Mais comme cette posture est excessive par rapport à la norme, cela vaut à mes yeux la peine de partager le périple. Ami Hégémonix de la santé qui croit que la médecine tient dans UNE solution, UNE approche, UNE logique, voici une petite pierre dans ton jardin.
Une autre particularité dans l'écoute de soi, par un exemple a contrario. Ma copine Y. utilise, comme moi, du tagatesse comme faux-sucre (elle pour des raisons de poids, moi pour des raisons de cure). Ce produit lui donne des selles molles, comme à bien d'autres mangeurs. Si j'avais cet effet, j'arrêterais illico. Je ne vis pas dans le corps ni dans le mental d'Y. , elle fait ce qu'elle veut, mais ma posture est: "si mon corps le refuse, pourquoi le lui imposer?".
Autre anecdote avec une copine. Je cite Françoise, mais j'ai eu des dizaines de réponses similaires. Ce billet aussi a été transféré en article: "Quelques réflexions autour de la foi dans la médecine et dans la croyance à la rationalité" 29/8/2021
Au fait, je l'ai déjà dit et je le répète: ne faites pas comme moi. J'assume mon choix de tester un médicament comme outil de diagnostic. Le médecin n'est pas là, mais je consulte 3 copains soignants sur le sujet, par téléphone. Ceci n'est qu'un carnet personnel, un carnet de route le long d'un périple particulier.