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Manque d’esprit critique de la gauche en général quant au récit médiatique covidien

6.11.2020 Je continue à ne pas comprendre le rapport de la gauche à la «crise sanitaire». Quasi tous ont l’air de croire vraiment à la sanitude de cette crise, de refuser de voir qu’il s’agit d’une crise économico politique.

Billet inclus dans le dossier "Le circus virule (ou ce que le covid-19 est venu nous dire"), amorcé début 2020. Répertoire "non-food" de ce site. Je mets ma casquette de Jiminy Cricket, comme pour le dossier à charge contre les Gafam. Je transfère certains des billets écrits en brouillon sur fb pendant le confinement. On les retrouve via le sommaire.

Je continue à ne pas comprendre le rapport de la gauche à la «crise sanitaire». Quasi tous ont l’air de croire vraiment à la sanitude de cette crise, de refuser de voir qu’il s’agit d’une crise économico politique. J’en veux pour preuve la formidable jeune Tatiana Ventose, commentatrice critique des actualités, radicalement à gauche.

Il faut voir le décodage qu’elle fait avec ses copains commentateurs politiques de Le Fil d’Actu : ils ont été invités par la Commission européenne pour découvrir leur structure, leurs services, leurs problèmes de comm’ et de rumeurs; et leur servir de relais youtubeur. Ceux qui les ont invités devaient avoir abusé de xanax/vodka ce jour-là, car ils ne savaient de toute évidence pas qu’ils n’invitaient pas des perdreaux de l’année. Le reportage est acide dans ses critiques, les jeunes parlent carrément d’une structure digne de l’URSS des belles années, si pas de 1984. Reportage: https://www.youtube.com/watch?v=_JKKgy4NOWc

Pour les personnes peu familières avec la techno-bureau-cratie, c’est une vidéo éclairante, qui peut servir d’alerte aux complotistes d’ailleurs: on y voit que les technocrates vivent hors sol, qu’ils s’agitent un peu comme des hamsters dans leur roue. Les complotistes qui croient à une conspiration feraient bien d’ouvrir les yeux: on est plus souvent au Festival des Andouilles, déconnectées du réel, que face à des comploteurs conscients.

Mais ... dans https://www.youtube.com/watch?v=Lz1HocGMH7k voilà t y pas que Tatiana valide carrément le confinement? comme mesure utile pour une «crise sanitaire majeure»? J’ai arrêté la vidéo à la moitié, les yeux et les oreilles se fermant de lassitude face à tant de platitudes.

Où est ton discernement choupinette, ce discernement si pointu dans tes autres analyses?

Je sais qu’au sein de cette crise covid chacun tire la couverture à soi, elle en profite pour tirer sur le gouvernement. Mais il est drôlement décevant de voir toute cette gauche (notre parti des travailleurs belges aussi, Raoul Hedebouw en tête) entonner la chanson apocalyptique du virus, sans relire la doc calmement, à tête reposée.

A un moment, j’ai eu un sursaut d’espoir politique en voyant la force intellectuelle de youtubeurs de cet acabit, plus profonds que bien d’autres. Et là, bardaf, c’est l’embardée (hommage à Manu Thoreau): le chaos a de beaux jours devant lui si même des jeunes, si frais, sont aussi gélifiés dans leurs analyses quand la peur s’en mêle...

Sur ce sujet, j’ai lu un éclairage intéressant chez Antipresse: «La covid-orthodoxie de gauche, ou la pensée de l’essaim». Article de l’éditeur Werner Reichel, traduit de l’allemand, dont certains termes me font sursauter mais bon, liberté d’expression.

Sur abonnement hélas*, je ne peux trahir l’équipe en copiant/collant la totalité. Il vous reste à vous abonner à l’Antipresse.net, leur magazine est riche et passionnant. Belle écriture, un délice.

L’essentiel en un extrait:

«Mais en vérité, la gauche et les opportunistes font effectivement partie – non pas d’une conspiration – mais de l’État profond, donc d’un réseau politique, d’un très grand mouvement social, et qui est d’une grande longévité. Qu’ils en soient conscients ou non.

L’État profond n’a pas besoin de meneurs qui tirent les ficelles. Il n’a besoin de personne pour diriger le réseau de façon centralisée. Il a justement ceci de typique qu’il est indépendant des personnes et des intérêts particuliers. L’État profond, ce sont les forces qui définissent l’orientation de l’évolution sociétale indépendamment du pouvoir politique du moment. Il fonctionne comme un vol d’oiseaux ou un banc de poissons.

Quand l’esprit de meute sert de GPS

Un vol d’oiseaux ou un banc de poissons n’ont pas de meneur. Personne n’explique à la sardine ou à l’hirondelle individuelle ce qu’elle doit faire. Un banc de poissons se forme et fonctionne sans chaos parce que chaque petit poisson sait instinctivement quel mouvement ou quel changement de direction il doit accomplir. Chaque sardine se cale sur le comportement de ses voisines immédiates. Celle qui sort du banc risque d’être dévorée par des prédateurs.

Cette peur fatale du petit poisson est partagée par la grande majorité des humains. Eux aussi ont peur de sortir du banc, d’attirer l’attention de gens qui désapprouvent leurs avis «contestables» dans leur entourage social. Tout comme pour la petite sardine, leur écart pourrait avoir des conséquences fatales. Qui veut rester dans le banc et avoir un futur, suit tout mouvement du banc sans beaucoup y réfléchir.»

* Abonnez-vous: https://antipresse.net/abonnements/

Capital de lire ce commentaire par Jorge Palma, sous un de mes derniers billets hier 6.11, où je demandais pourquoi les gens de gauche, en général, font leur si naturellement l’idéologie dominante en matière sanitaire

«Je pense que la bonne réponse est à chercher chez Castoriadis. Le problème est d’ordre épistémologique.

La gauche est née autour de et reste attachée à l’idée de progrès. Elle a de l’admiration pour la pensée scientifique conventionnelle qui rend possible le progrès matériel et a tendance à voir la démarche scientifique comme neutre et libre de conflit d’intérêt, perdant de vue la démonstration de Habermas en ce sens que, comme toute activité productive, la production scientifique est un acte en situation soumis aussi à des conditions sociales de production. En effet, c’est parce ce qu’il y a le moteur du profit financier que la médecine moderne est devenue une médecine de la molécule. En axant son action dans la recherche de molécules, elle trouvera des molécules car, on trouve ce que l’on recherche mais, ce faisant, elle passera à côté de voies plus prometteuses et termes de santé mais, inintéressantes en termes commerciaux.

De ce fait, la gauche perd de vue que la science n’est pas neutre et qu’elle fait partie de l’idéologie dominante du capitalisme. Ainsi, la médecine conventionnelle, en tant que fille de la science, est vue par les gens de gauche comme parée des mêmes qualités attribuées naïvement à la dernière.

Face à une épidémie, la parole des «experts», venue de la neutralité de la science, sera donc la seule voix autorisée pour la plupart des gens de gauche, de la social-démocratie à l’extrême gauche.

Castoriadis va plus loin, lui. Pour lui, c’est le mode de pensée identitaire ensembliste occidental dominant, lui-même, la lignée Aristote-Descartes, qui empêche, y compris, voire surtout, la science, de sortir du cercle vicieux nous barrant l’accès à la pleine autonomie et à une société émancipée. Et, gauche et droite ont en commun de raisonner à l’intérieur de la pensée occidentale identitaire ensembliste dominante (qui non, par ailleurs ?), et d’avoir un rapport scientiste à la science.

Ce n’est pas par hasard que gauche et droite sont également productivistes et pro-croissance. Pas étonnant non plus que ces médecins très dévoués de «médecine pour le peuple» n’aient aucune critique de fond à adresser à la médecine conventionnelle, la médecine des molécules (qu’est en réalité la médecine du capitalisme dominant), et que leur but soit essentiellement de la socialiser, dans le sens de la rendre accessible à bas prix aux classes populaires.

Ajoutons à cela une particulière sensibilité au discours de la peur et, tout est fait pour qu’aucun espoir ne soit envisageable de voir les gauches adopter une position critique vis-à-vis du mode de gestion de la crise sanitaire (sauf sur des aspects factuels comme nombre de lits et de personnel, salaires, matériel de protection..), moins encore de visualiser la menace totalitaire actuelle. Peu de gens, y compris à gauche, dénoncent l’illégalité des mesures restrictives et la plupart accepte les pertes de libertés, au nom de la sécurité.

Une intervention de Mélenchon au parlement français pourrait être un début d’exception.

Quant aux comploteurs conscients, cela ne veut pas dire qu’ils n’existent pas mais, ce n’est pas à ce niveau là --des exécutants à leur insu (un complot, pour qu’il marche ne doit être connu que par un cercle très restreint)-- qu’il faut les chercher. «

NB. J’ai juste rajouté quelques retours lignes pour la clarté de lecture. Merci Jorge, très éclairant.

Jorge a joint cette vidéo de JL Mélenchon à l’Assemblée Nationale le 4 novembre 2020: «Macronistes : vous limitez les libertés individuelles et collectives» au cours de laquelle ce dernier, très subtilement, souligne que les membres du Conseil de Défense qui a pris les rênes de la crise sanitaires ne sont pas aussi exonérés des responsabilités qu’ils le croient - par un défaut légal que Méluche souligne mine de rien. Cela devrait refroidir les ardeurs des Castex, Parly et Véran qui font partie de ce Conseil.

Comme toujours avec ce cher Jean-Luc, une leçon de politique en quelques minutes!

-> https://www.youtube.com/watch?v=bvoOLKCV6Bw

 


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